Tuerie de masse à Prague

La fusillade qui vient d’avoir lieu au sein de l’Université Charles à Prague et ayant causé une quinzaine de décès et près de vingt-cinq blessés est l’occasion de revenir à la fois sur la réglementation tchèque en matière d’accès des particuliers aux armes et sur les tueries de masse qui sont loin d’être une spécificité américaine.

En premier lieu, la République tchèque a fait le choix d’une approche libérale en matière d’accès des particuliers aux armes ; un choix qui s’inscrit dans une longue tradition historique. En effet, c’est bien avant le Second amendement à la Constitution américaine (1791) que les habitants de ce qui deviendra la Tchéquie signent l’Accord de Saint-Venceslas en 1517. Cet accord stipule que « toutes les personnes de toutes conditions ont le droit de garder des armes à feu à la maison » et a perduré sous différentes formes jusqu’à l’époque contemporaine ; seuls les occupants allemands y mettront fin après 1939 ! L’indépendance retrouvée, après 1989, conduisit les autorités post-communistes à rétablir le régime libéral hérité de l’histoire tchèque. Libéral ne signifie pas pour autant laxiste. Pour acquérir une arme (pour une durée limitée à cinq ans), un Tchèque doit être majeur et résider dans le pays ; juridiquement capable, il doit être apte médicalement et psychologiquement, ne pas avoir été l’objet d’une condamnation et maîtriser techniquement l’usage des armes (Act on Firearms, 9 mars 2002, sect. 23).

En second lieu, loin d’être une spécificité américaine, de telles tueries de masse s’observent dans pratiquement tous les pays de la planète, y compris dans ceux disposant de législations très strictes en matière d’accès aux armes. La typologie de cet évènement, pour ce que l’on en sait, est assez semblable à ce que l’on peut observer aux États-Unis en matière de tueries de masse. L’auteur est un homme (99% des criminels), jeune (24 ans ; aux USA les 2/3 des auteurs ont entre 15 et 40 ans), au profil psychologique fragile comme 75% des auteurs de tueries (introverti, misanthrope et possédant des tendances suicidaires ; l’enquête dira ce qu’il en est de sa consommation de stupéfiants). Par ailleurs et comme pour près de la moitié des tueries de masse qui interviennent, le tragique évènement s’est produit sur le lieu de « travail » du criminel (étudiant, il est possible de considérer que l’Université était son « lieu de travail »). Enfin, avant même de passer à l’acte, l’auteur était recherché par les forces de l’ordre pour le meurtre de son père…

Je n’aurais pu écrire ces lignes sans l’aide amicale du Dr Saint-Germain que je remercie de m’avoir adressé son récent essai : (P)rendre les armes ? Une étude brillante qui aborde l’ensemble des enjeux de la liberté d’accès des particuliers aux armes, entre droit, philosophie et histoire.